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lundi 5 octobre 2020

Les "fameux temples" d'Abou Simbel "vaudraient à eux seuls le voyage" (le peintre Auguste André)

photo de  Félix Bonfils (1831-1885)

"Notre voyage dans le sud est fini. C’est avec un serrement de cœur que j'entends les cloches électriques donner le signal du départ. Qu’y avait-il devant nous ? Être si près de pays mystérieux et revenir dans les sentiers battus.
Pas de crocodiles, hippopotames, autruches, girafes. Nous en avons approché tout près. Nous sommes à une énorme distance de la France. Plus de quinze jours et tout finit subitement devant une ville de garnison bête. Que l’on voudrait donc avoir des compagnons et s'élancer dans ces pays inconnus.
Nous repassons devant les belles montagnes qui émergent des sables comme des îlots. C’est un aspect très particulier que je n'avais jamais vu. N’allez pas croire que les Anglais y ont fait attention. Ils sont tous en train de lire ou dans leur cabine.

Abou-Simbel. — Nous arrivons à 3 heures 1/2 aux fameux temples. Nous nous amassons devant. Ils vaudraient à eux seuls le voyage. Le grand temple est une merveille. Les quatre statues colossales de Rhamsès sont assises devant. Les figures sont pareilles et ressemblent à celle de Memphis, ce qui prouvent qu’elles devaient être dans le caractère. L'une d'elles malheureusement est à moitié brisée. La partie tombée ressemble à un rocher. On y remarque l'oreille et la coiffure. Aux pieds des grandes figures sont des petites, puis des statues d'oiseaux, précédant les dernières, rappellent un peu les monstres des tours de Notre-Dame. Tout cela a été taillé dans le roc sur le bord du Nil. L'intérieur est remarquable.
La première salle contient une rangée de statues de 10 mètres de haut (Les yeux indiqués en noir). Elles ne sont pas trop abîmées. L’une a sa figure complète. Elles étaient peintes autrefois.
Sur les murs et colonnes, nombreuses scènes de la vie de Rhamsès et de sa femme Nefert-Ali.
Il tient à la main gauche les têtes d’ennemis suppliants. De la droite, levée en arrière, il va les frapper. Il est sur un char, bien plus grand que les autres figures. Les rênes des deux chevaux au galop sont attachées autour du corps. Il perce de ses flèches, l'arc tendu et le bras allongé, les ennemis situés sur un fort.
L'un d'eux tombe des murs, blessé. Un autre est en bas des murs, poussant devant lui des animaux. Il se retourne suppliant.
Les chevaux du roi ont leurs têtes ornées de plumes. Plus loin, le roi est assis sur un char traîné par deux chevaux au pas. C’est sans doute un triomphe. Des prisonniers enchaînés le précèdent. Ce sont des nègres avec leur couleur.
Sorte de sacrifice.
Encore une espèce de triomphe. Les soldats marchent armés de boucliers et de lances. Plus loin le roi est assis. Des femmes viennent pleurer et demander la vie de leurs maris situés en dessous.
Les malheureux sont conduits à coups de fouet.
Le roi tient à la main gauche les toupets des ennemis qui sont à genoux et tendent leurs mains suppliantes des deux côtés. À gauche, des hommes à nez crochus, de race sémitique, sans doute. À droite, des nègres.
Horus reçoit le roi, représenté aussi le bras droit étendu. Des soldats portent un bateau.
En haut, la femme de Rhamsès est sous des feuillages. Sur les colonnes, Rhamsès est représenté avec des femmes ou des divinités. Il n’est pas toujours convenable. Plusieurs figures sont inconvenantes.
Dans les autres temples, on les à généralement détruites. Je ne comprends pas la pose qu’il prend dans un des bas-reliefs. Il a un bras en arrière et l'autre je ne sais.
La chambre du fond comprend plusieurs colosses assis, mais bien détruits. Horus, Hammon Rha, etc.
Les autres pièces sont intéressantes. L'une d'elles est remplie de chauves-souris. Elles sont pressées dans tous les coins. ll y en a des centaines qui voltigent autour de nous d'un air effrayé. Je promène ma bougie sous elles et elles sont affolées. Ces bêtes donnent une odeur fort désagréable."

extrait de Égypte et Palestine. Notes de voyage, 1905, par (J.-) Auguste André.

Nous ne disposons malheureusement d'aucune information sur ce peintre, sinon qu' "atteint très jeune d'une maladie de poitrine, il succomba bientôt aux assauts du terrible mal, sans avoir donné la mesure de ses facultés. Il s'était mis visiter les plus beaux pays du monde, demandant en vain au soleil et aux éternels printemps une santé perdue." ( revues Études, 1905)

"Vivement pénétré du charme ou de la splendeur des magnifiques pays qu'il traversait, doutant de lui-même, jamais satisfait mais jamais découragé, il mettait tout son effort à traduire exactement la nature sans rien accorder aux roueries du métier et aux faibles habiletés du pinceau.
Ce consciencieux labeur avait déjà porté ses fruits : les nombreuses études et les quelques tableaux qu'il avait rapportés de ses derniers voyages d'Égypte sont remarquables de vie, d'intensité de lumière et de personnalité et lui promettaient le plus brillant avenir, avenir bientôt brisé, hélas ! par un mal sans espoir." (H. Louvet, préface de l'ouvrage)