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jeudi 27 septembre 2018

Les caractères du dessin égyptien, par Marcelle Baud

ostracon, profil royal (Ramsès VI) ca 1130 av. J.-C. Musée du Louvre
"Avant d'aborder l'étude des monuments égyptiens, il est nécessaire de fixer en quelques mots les caractères du dessin égyptien qui dominent toutes les expressions artistiques en Égypte. Un monument égyptien ancien se reconnaît entre tous pour certaines caractéristiques que nous essaierons de définir. Il est curieux de constater que les mathématiques égyptiennes ne procédaient que par des moyens empiriques et de voir qu'en même temps le dessin égyptien relève directement des géométries dans l'espace et descriptive.
Les arts asiatiques, dès la plus haute antiquité, ont cherché à rendre ce qu'ils voyaient. L'art grec, leur héritier, est allé bien plus avant dans cette voie et les peintures de vases donnent des essais de raccourci et de perspective rudimentaires. Les Romains n'eurent qu'à continuer et c'est en Italie au XVIe siècle que furent énoncées, par Paolo Uccelo, les règles de la perspective qui régissent encore le dessin. Les Égyptiens, dès qu'ils ont voulu faire des représentations figurées, ont abordé le problème d’une toute autre façon.
Ils ont toujours dédaigné la représentation perspective directe, qui est la plus facile et se présente à l'esprit la première, pour aborder une représentation descriptive et géométrique des objets tels qu’ils sont et non tels qu'on les voit. La recherche était ardue ; on a souvent parlé de dessin enfantin à propos du dessin égyptien ; il serait plus vrai de dire que tous les deux cherchent à être logiques et que le dessin égyptien y réussit presque toujours.
Ce n'est pas la vision des deux épaules dans une figure de profil, d'un œil de trois quarts dans le profil du visage, c’est la vraie largeur des épaules par rapport à la hauteur du corps, la plus grande dimension de l’œil, dans sa position en raccourci, que les dessinateurs égyptiens ont essayé de montrer.
De même la dimension des personnages ou des objets l'un par rapport à l'autre n'est jamais commandée par la vision que le scribe pouvait avoir d'un modèle, mais par l’idée qu'il voulait que ce modèle exprimât. On verra des bovidés tenus en laisse et arrivant à la hauteur du genou ou de la taille de celui qui les conduit dans les représentations funéraires des domaines, ou un grand personnage représenté d’une taille double ou triple de ceux qui l’entourent. “Les conventions du dessin égyptien” n'ont jamais été qu'un artifice d'écriture et d'expression et la preuve en est qu'elles modifient suivant l’idée qu'on veut exprimer et la place que le dessinateur assigne au spectateur."

extrait du Guide Bleu Égypte, Hachette, 1956,
édition établie par Marcelle Baud (1890-1987), copiste