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dimanche 11 novembre 2018

Les artistes égyptiens étaient "des ouvriers chargés de faire de l'histoire plutôt que de l'art" (Louis-Auguste Martin)

 
temple de Ramsès II - Abou Simbel - photo MC
"L'architecture égyptienne (...) subit dans les premiers temps d'heureuses modifications ; il y a loin des Pyramides aux monuments de Thèbes et de Memphis. L'architecture qui s'est formée et développée en Égypte, présente un cachet unique, original. Exécutés sous l'inspiration des rois et des prêtres, les palais et les temples ont affecté un style uniforme, et obéi comme les hiéroglyphes à une plan et à des règles déterminés. L'artiste n'inventait pas, il copiait ; aussi Platon rapporte-t-il que des modèles étaient déposés dans les temples ; qu'il était défendu aux artistes, sous peine de sacrilège, de rien changer aux règles : "Il y a plus de dix mille ans, ajoute-t-il, que ces règles ont été posées, et les œuvres de ces temps reculés n'étaient ni plus ni moins belles que celles de nos jours ; elles sont toutes, sans exception, travaillées sur un modèle."
Et, en effet, les plus anciennes peintures sont identiquement pareilles aux plus modernes ; les différences qu'on peut y remarquer sont en faveur des premières, la domination étrangère ayant amené la décadence de toutes choses en Égypte.
Les artistes n'étaient donc plus que des ouvriers chargés de faire de l'histoire plutôt que de l'art, d'exécuter des monuments et des inscriptions commémoratifs de grands événements et de hauts faits, de traiter des sujets religieux et politiques, d'après une formule consacrée.
On trouve encore à Thèbes des débris de constructions très anciennes qui ont servi de matériaux pour des édifices qui datent de plus de quatre mille ans. Les plus simples ornements de ces édifices consistent en emblèmes qui renferment des dates et des faits historiques. Des bas-reliefs, entremêlés d'inscriptions, représentent avec fidélité la physionomie, le costume et les habitudes des peuples étrangers vaincus parles Pharaons.
Quant aux pyramides, les avis sont très partagés sur le mode de construction qu'on employa pour les élever. L'époque très ancienne où elles furent élevées ne saurait être déterminée positivement ; elles annoncent l'art dans son enfance, celui des constructions massives succédant aux blocs informes superposés. (...)

Une inscription rapportée par Diodore de Sicile constate que Sésostris n'employa aucun Égyptien aux monuments qu'il fit construire. Il n'est pas probable qu'on en ait agi ainsi pour les pyramides, car leur édification ayant exigé un trop grand nombre de bras, et remontant à une époque où les Égyptiens songeaient plutôt à s'organiser au dedans qu'à faire des expéditions au dehors, elles durent être à la fois les premiers temples élevés par les Égyptiens aux dieux, et les premiers tombeaux consacrés à leurs rois." 

extrait de Les civilisations primitives en Orient : Chinois, Indiens, Perses, Babyloniens, Syriens, Égyptiens, 1861, par Louis-Auguste Martin (1811-1875),
historien, littérateur, photographe, sténographe de la Chambre des députés.