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lundi 19 novembre 2018

"À Beni Hassan nous suivons de la première à la dernière les pratiques de l'agriculture égyptienne" (Max Dunker)

Récolte de fruits - tombe de Khnumhotep II (cliché Université de Macquarie)

"Si les grandes constructions nous montrent les derniers progrès d'une civilisation fort avancée, rien ne nous empêche de compléter le tableau en observant dans le plus grand détail l'état, la vie, les mœurs, les usages, les arts du pays. Nous n'avons qu'à jeter les yeux sur les tombeaux taillés dans les rochers de Béni Hassan, de Berschéh et de Siout (moyenne Égypte) qui appartiennent à cette période de l'histoire d’Égypte. On voit sur les tombeaux de Berschéh le transport d'une statue colossale. L'inscription qui l'accompagne lui donne 6m,82 de haut. Elle est posée sur un traîneau et tirée à bras d'hommes. 
À Béni Hassan nous suivons de la première à la dernière les pratiques de l'agriculture égyptienne. Des bœufs ou des esclaves tirent les charrues qui sont de cinq modèles différents. À défaut de herse, des brebis et des chèvres enterrent en piétinant les grains ensemencés. Le blé coupé est mis en gerbes, foulé par des bœufs au lieu d'être battu, mis en sac et porté dans les greniers. On charge le lin sur le dos des ânes, on cueille le lotus et les figues, on vendange. Le raisin est tantôt foulé aux pieds, tantôt pressuré dans un pressoir à levier ; les vases remplis de vin s'en vont aux celliers. Nous voyons arroser les champs, cultiver les jardins, soigner les oignons ; nous voyons le régisseur et ses scribes. Le régisseur juge les ouvriers paresseux et négligents ; après avoir entendu l'accusation et la défense, il fait appliquer la bastonnade au coupable et présente au maître un rapport écrit sur l'incident. Nous suivons avec la même exactitude l'élève du bétail. Nous voyons de beaux troupeaux de bœufs, de vaches et de veaux, d'ânes, de brebis et de chèvres, à l'écurie ou au pâturage avec leurs bergers. Nous voyons traire les vaches, fabriquer le beurre et le fromage. Une foule de canards et d'oies, appartenant à diverses espèces garnissent les basses cours. Même facilité à étudier exactement les métiers à l'œuvre, grâce aux tableaux des tombeaux de Béni Hassan. Nous voyons filer et tisser ; nous suivons le potier dans toutes les phases de sa besogne, depuis la première manipulation de l'argile jusqu'à l'achèvement et à la cuisson du vaisseau. Le charpentier et le tourneur, le tanneur et le cordonnier, le forgeron et l'orfèvre, le tailleur de pierres et le peintre travaillent sous nos yeux ; nous voyons confectionner des rames, des lances, des javelots, des arcs et des flèches, des massues et des haches d'armes, préparer enfin et même souffler le verre en passant par toutes les opérations.
La maison égyptienne nous découvre tout son intérieur, simple ou riche, avec son mobilier complet, avec les chiens, les chats et les singes qui comptaient parmi les habitants. La domesticité est sur pied et la cuisine fonctionne en grand. Ailleurs ce sont des soldats de toute arme et des officiers de tout grade, la discipline et l'art, militaire en action, la bataille, le siège, le bélier qui bat les murs ennemis, le toit de boucliers sous lequel l'armée assiégeante s'approche pour donner l'assaut.
Nous voyons comment on prenait les oiseaux avec des pièges et des filets, les poissons à l'hameçon, au filet, avec une fourchette à deux ou à trois dents ; nous assistons à plusieurs sortes de chasses. De longues files
de lutteurs nous font voir toutes les attitudes de cet exercice qui paraît avoir été fort pratiqué. À divers autres exercices de gymnastique se mêlent des jeux de pur amusement, par exemple celui de la balle et celui de la mourre. Nous voyons des danseurs et des danseuses dans les attitudes les plus variées et les plus étudiées ; les harpes et les flûtes qui se font entendre offrent une grande diversité de formes. Voici un chanteur qu'un musicien accompagne avec la harpe ; deux chœurs, l'un d'hommes, l'autre de femmes marquent la mesure avec les mains et complètent le concert. Les grands nous apparaissent dans des barques ou des litières richement ornées ; ils ont un nombreux cortège dans lequel nous remarquons beaucoup de nègres, des nains et quelques monstres humains." 


extrait de Les Égyptiens : histoire de l'antiquité, par Max Dunker (sic pour Duncker) ; traduction Mossmann.  Maximilian Wolfgang Duncker (1811-1886) était un historien et homme politique allemand

mardi 6 novembre 2018

"Jamais ni la sculpture, ni la peinture ne sont devenues indépendantes chez les Égyptiens. Elles ne semblent faites que pour compléter l'architecture." (Max Dunker)

Piliers osiriaques à Karnak - photo Daniel Csörföly
"Les prêtres d'Égypte avaient aussi la haute main dans les travaux et les œuvres d'art. Ils fournissaient par privilège les plans des édifices, des temples, et ceux des tombeaux, car il s'agissait essentiellement de choses saintes, de mesures et de nombres sacrés. De même que l'architecture, la sculpture et la peinture étaient avant tout au service de la religion. Conformément au caractère du peuple, l'architecture égyptienne vise à la solidité et à la durée. Simples dans leurs grandes lignes, les édifices sont hauts, larges et massifs comme les chaînes de rochers qui bornent l'Égypte. Les plus anciens monuments que porte la terre, les pyramides, nous ont déjà montré jointe à une parfaite simplicité de forme, une habileté remarquable à tailler et à assembler de grandes masses de pierre. Engagée dans cette voie, l'architecture égyptienne y marche, adopte des formes plus riches, recherche l'ornementation, mais reproduit toujours plus ou moins la sévérité et la netteté du plan primitif. Jamais ni la sculpture, ni la peinture ne sont devenues indépendantes chez les Égyptiens. Elles ne semblent faites que pour compléter l'architecture, pour l'aider à fixer et à faire survivre au cours au temps l'image du roi, ses sacrifices et ses exploits, tel ou tel événement de son règne. 
La sculpture égyptienne saisit hardiment les formes par un procédé naïf et sobre, mais intelligent. Elle ne tombe point dans la symbolique de fantaisie. Elle assujettit à des proportions sûres la reproduction de la forme humaine, elle parvient à exprimer le mouvement par des traits caractéristiques ; elle attrape avec plus de bonheur encore la forme et le caractère des animaux. 
Comme l'architecture, elle choisit de préférence pour matériaux les masses les plus dures et les plus indestructibles. Ici comme ailleurs, le type une fois établi, le canon de proportion reçu, le procédé, la méthode et la forme restent et demeurent invariables. Curieuse d'une parfaite exactitude d'exécution, la sculpture semble se complaire à reproduire, sans jamais se lasser, dans la matière la plus rebelle, les mêmes figures plus géométriques pour ainsi dire que naturelles. Mais en dépit de ce caractère typique, il y a des progrès sensibles dans la sculpture et la peinture, comme dans l'architecture.
Si la statuaire du temps des pyramides, des Aménemha et des Sésortosis offre déjà pour l'époque une grande correction de forme, de la vie et de l'énergie dans l'expression de l'action, de la vigueur dans les parties musculeuses, les sculptures du nouvel empire se distinguent par la variété des formes, par la richesse des lignes, par la finesse du contour, par un dessin bien plus délicat des figures, par une grâce qui se soutient jusque dans l'exécution des plus fortes colonnes et des plus gros chapiteaux. Les Touthmosis et les Aménophis, les Séthos et les premiers Ramsès proposèrent ou commandèrent à la sculpture ésyptienne une multitude presque accablante de travaux, et c'est alors quelle atteignit son plus haut point. Mais comme elle ne pouvait pas s'écarter du type consacré, la plupart des œuvres et des sujets furent traités par une méthode de plus en plus conventionnelle, et on finit par se contenter de la précision des contours. La sculpture égyptienne porte ce caractère depuis les temps de Ramsès III jusqu'à ceux de Psammétique. À cette dernière époque elle renaît et brille par une imitation plus fidèle de la nature, par une expression plus aimable des formes du corps."

extrait de Les Égyptiens : histoire de l'antiquité, par Max Dunker (sic pour Duncker) ; traduction Mossmann.
 

Maximilian Wolfgang Duncker (1811-1886) était un historien et homme politique allemand