Récolte de fruits - |
"Si les grandes constructions nous montrent les derniers progrès d'une civilisation fort avancée, rien ne nous empêche de compléter le tableau en observant dans le plus grand détail l'état, la vie, les mœurs, les usages, les arts du pays. Nous n'avons qu'à jeter les yeux sur les tombeaux taillés dans les rochers de Béni Hassan, de Berschéh et de Siout (moyenne Égypte) qui appartiennent à cette période de l'histoire d’Égypte. On voit sur les tombeaux de Berschéh le transport d'une statue colossale. L'inscription qui l'accompagne lui donne 6m,82 de haut. Elle est posée sur un traîneau et tirée à bras d'hommes.
À Béni Hassan nous suivons de la première à la dernière les pratiques de l'agriculture égyptienne. Des bœufs ou des esclaves tirent les charrues qui sont de cinq modèles différents. À défaut de herse, des brebis et des chèvres enterrent en piétinant les grains ensemencés. Le blé coupé est mis en gerbes, foulé par des bœufs au lieu d'être battu, mis en sac et porté dans les greniers. On charge le lin sur le dos des ânes, on cueille le lotus et les figues, on vendange. Le raisin est tantôt foulé aux pieds, tantôt pressuré dans un pressoir à levier ; les vases remplis de vin s'en vont aux celliers. Nous voyons arroser les champs, cultiver les jardins, soigner les oignons ; nous voyons le régisseur et ses scribes. Le régisseur juge les ouvriers paresseux et négligents ; après avoir entendu l'accusation et la défense, il fait appliquer la bastonnade au coupable et présente au maître un rapport écrit sur l'incident. Nous suivons avec la même exactitude l'élève du bétail. Nous voyons de beaux troupeaux de bœufs, de vaches et de veaux, d'ânes, de brebis et de chèvres, à l'écurie ou au pâturage avec leurs bergers. Nous voyons traire les vaches, fabriquer le beurre et le fromage. Une foule de canards et d'oies, appartenant à diverses espèces garnissent les basses cours. Même facilité à étudier exactement les métiers à l'œuvre, grâce aux tableaux des tombeaux de Béni Hassan. Nous voyons filer et tisser ; nous suivons le potier dans toutes les phases de sa besogne, depuis la première manipulation de l'argile jusqu'à l'achèvement et à la cuisson du vaisseau. Le charpentier et le tourneur, le tanneur et le cordonnier, le forgeron et l'orfèvre, le tailleur de pierres et le peintre travaillent sous nos yeux ; nous voyons confectionner des rames, des lances, des javelots, des arcs et des flèches, des massues et des haches d'armes, préparer enfin et même souffler le verre en passant par toutes les opérations.
La maison égyptienne nous découvre tout son intérieur, simple ou riche, avec son mobilier complet, avec les chiens, les chats et les singes qui comptaient parmi les habitants. La domesticité est sur pied et la cuisine fonctionne en grand. Ailleurs ce sont des soldats de toute arme et des officiers de tout grade, la discipline et l'art, militaire en action, la bataille, le siège, le bélier qui bat les murs ennemis, le toit de boucliers sous lequel l'armée assiégeante s'approche pour donner l'assaut.
Nous voyons comment on prenait les oiseaux avec des pièges et des filets, les poissons à l'hameçon, au filet, avec une fourchette à deux ou à trois dents ; nous assistons à plusieurs sortes de chasses. De longues files de lutteurs nous font voir toutes les attitudes de cet exercice qui paraît avoir été fort pratiqué. À divers autres exercices de gymnastique se mêlent des jeux de pur amusement, par exemple celui de la balle et celui de la mourre. Nous voyons des danseurs et des danseuses dans les attitudes les plus variées et les plus étudiées ; les harpes et les flûtes qui se font entendre offrent une grande diversité de formes. Voici un chanteur qu'un musicien accompagne avec la harpe ; deux chœurs, l'un d'hommes, l'autre de femmes marquent la mesure avec les mains et complètent le concert. Les grands nous apparaissent dans des barques ou des litières richement ornées ; ils ont un nombreux cortège dans lequel nous remarquons beaucoup de nègres, des nains et quelques monstres humains."
extrait de Les Égyptiens : histoire de l'antiquité, par Max Dunker (sic pour Duncker) ; traduction Mossmann. Maximilian Wolfgang Duncker (1811-1886) était un historien et homme politique allemand
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