Musée du Louvre / Christian Décamps
Les qualités qu'on doit distinguer dans la peinture des Égyptiens, sont donc par-dessus tout, une simplicité qui les a souvent élevés jusqu'à la grandeur esthétique et pittoresque ; une certaine clarté, forte dans les pantomimes, clarté qui appartient autant à l'art qu'à la nature, qualité précieuse dont les Grecs semblent avoir reconnu tout le prix ; de plus un ordre optique dans la disposition, ordre qui chez eux tient trop, il est vrai, de la symétrique régularité, mais que les Grecs surent varier plus tard délicatement, tout en le conservant. On doit remarquer aussi dans les meilleurs monuments égyptiens qu'ils étaient loin de négliger la pondération, sur laquelle ils avaient même des idées très exactes, ainsi que sur tout ce qui tient à la géométrie et à la statique en général ; ils observèrent donc scrupuleusement la correspondance des angles, et ils surent en mesurer rigoureusement les degrés.
Cette qualité les conduisit à donner du mouvement à leurs figures, et ils n'avaient plus qu'un pas à faire pour devenir de bons dessinateurs ; mais il paraît qu'ils se contentèrent d'employer ce qu'il fallait seulement pour le geste et la proportion de leurs personnages. Enfin je pense que l'on parviendrait à réhabiliter le crédit de l'art égyptien, si l'on rassemblait avec intelligence d'exacts dessins de tout ce qu'il a produit de plus recommandable. On y reconnaîtrait du génie et de la fécondité, un goût grand et sévère, des draperies fort pittoresques et très variées, et par-dessus tout une règle sacrée, bien méconnue aujourd'hui, je veux dire celle qui commande d'employer peu de moyens pour exprimer beaucoup d'idées ; méthode sage et vraiment noble, source du véritable goût dans les arts, méthode bien préférable à celle qui conduit d'abord aux finesses et aux recherches moelleuses de l'art, pour ne produire que des riens sans caractère.
On désirerait peut-être voir ajouter de plus ici quelques aperçus au sujet de leur coloris (...). Faisons observer seulement que, s'il est vrai qu'on prescrivait aux peintres l'emploi de couleurs vives et entières, nous ne devons pas en conclure qu'ils ne pratiquaient que l'enluminure et la peinture sans dégradation aérienne."
extrait de Traité complet de la peinture, T. 2, par Jacques-Nicolas Paillot de Montabert (1771-1849), peintre et historien de l'art français.
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