Including Malta-Dalmatia-Turkey-Asia Minor-Grecian Archipelago-Egypt-Nubia-Greece-Ionian Islands-Sicily-Italy-and Spain, 1843.
Je vous ai écrit ma dernière lettre assis au pied d'un groupe de douns, en face de Denderah.
Le jour suivant, nous croisâmes le Nil de bonne heure et nous mîmes pied à terre auprès de ce village ; son nom moderne rappelle celui de Tentyre. Les palmiers et les sunts qui l'environnent lui donnent un aspect riant. Du reste cette bourgade est peu étendue, pauvre et composée de misérables cahutes bâties en terre. Nous n'y restâmes que le temps nécessaire pour acheter quelques provisions et nous procurer des montures ; et aussitôt nous prîmes le chemin des ruines. Elles sont à une lieue au sud-ouest du village, dans l'intérieur des terres.
Ayant traversé la forêt, nous aperçûmes le temple à quelque distance : nous vîmes d'abord à la gauche de notre chemin six colonnes d'un assez mauvais style, qui ont appartenu à un ancien édifice. Après avoir fait une foule de détours, auxquels nous obligèrent les inondations du Nil, nous arrivâmes aux propylies du grand temple. Une porte construite en énormes masses de couleur rougeâtre, s'élève au milieu des décombres : elle est de forme pyramidale, très mutilée d'un côté, parfaitement conservée de l'autre ; des figures symboliques et des hiéroglyphes couvrent ses faces : un globe ailé plane sur sa large corniche. Je traversai cette magnifique porte, et je me trouvai en face de la construction principale.
J'essaierais en vain de vous faire comprendre les sensations que j'éprouvai dans ce moment ; ce que j'avais sous les yeux surpassait l'idée que mon imagination s'en était faite. Muet d'étonnement et d'admiration, je m'assis sur un bloc de pierre en face du portique ; j'oubliai l'univers entier, et je m'abîmai dans la contemplation.
Lorsque, revenu à moi-même, je pus enfin me livrer à l'examen des détails, je découvris partout les proportions les plus parfaites, des lignes simples et graves jusqu'au sublime. Les bas-reliefs, les hiéroglyphes, les inscriptions et les ornements si multipliés ne nuisent point à la masse sévère de l'ensemble : ils disparaissent dans l'immensité de l'édifice, pour ne laisser voir que de grandes lignes. La forme pyramidale, qui se retrouve dans tous les ouvrages égyptiens, leur donne une solidité qui semble indestructible et une incomparable majesté.
Que n'ai-je pu lire tout ce qui se trouve écrit sur les murs de cet admirable monument ! Que n'ai-je pu y faire revivre pour un instant les anciens Égyptiens, et assister à leur culte et à leurs pompeux sacrifices ! Les journées que j'ai passées à Tentyre ne s'effaceront jamais de ma mémoire. Quand on a vu ce monument, plus merveilleux que les pyramides elles-mêmes, on a oublié toutes les fatigues d'un long voyage.
Plus on s'éloigne de Denderah, et plus la nature s'embellit : de toutes parts s'étendent de grands villages, des forêts de douns, des champs cultivés et des prairies qu'animent de grands troupeaux de buffles. Le fond du paysage est toujours occupé par la chaîne de Mokattam. Ses roches dentelées contrastent avec la fertilité qui règne sur les rivages du fleuve, et donnent à la contrée un aspect enchanteur."
Extrait de Lettres sur l'Orient, écrites pendant les années 1827 et 1828, tome second, Paris 1829, par le vicomte Marie-Théodore Renouard de Bussière (1802-1865), diplomate (1821-1830), historien et peintre. Il réalise de longs voyages en Orient, se rendant à Constantinople, visitant toute l'Égypte et la Nubie, traversant le Sinaï et rentrant par Suez et Alexandrie. En 1829, il publie deux volumes accompagnés d'un atlas de ces voyages.
J'essaierais en vain de vous faire comprendre les sensations que j'éprouvai dans ce moment ; ce que j'avais sous les yeux surpassait l'idée que mon imagination s'en était faite. Muet d'étonnement et d'admiration, je m'assis sur un bloc de pierre en face du portique ; j'oubliai l'univers entier, et je m'abîmai dans la contemplation.
Lorsque, revenu à moi-même, je pus enfin me livrer à l'examen des détails, je découvris partout les proportions les plus parfaites, des lignes simples et graves jusqu'au sublime. Les bas-reliefs, les hiéroglyphes, les inscriptions et les ornements si multipliés ne nuisent point à la masse sévère de l'ensemble : ils disparaissent dans l'immensité de l'édifice, pour ne laisser voir que de grandes lignes. La forme pyramidale, qui se retrouve dans tous les ouvrages égyptiens, leur donne une solidité qui semble indestructible et une incomparable majesté.
Que n'ai-je pu lire tout ce qui se trouve écrit sur les murs de cet admirable monument ! Que n'ai-je pu y faire revivre pour un instant les anciens Égyptiens, et assister à leur culte et à leurs pompeux sacrifices ! Les journées que j'ai passées à Tentyre ne s'effaceront jamais de ma mémoire. Quand on a vu ce monument, plus merveilleux que les pyramides elles-mêmes, on a oublié toutes les fatigues d'un long voyage.
Plus on s'éloigne de Denderah, et plus la nature s'embellit : de toutes parts s'étendent de grands villages, des forêts de douns, des champs cultivés et des prairies qu'animent de grands troupeaux de buffles. Le fond du paysage est toujours occupé par la chaîne de Mokattam. Ses roches dentelées contrastent avec la fertilité qui règne sur les rivages du fleuve, et donnent à la contrée un aspect enchanteur."
Extrait de Lettres sur l'Orient, écrites pendant les années 1827 et 1828, tome second, Paris 1829, par le vicomte Marie-Théodore Renouard de Bussière (1802-1865), diplomate (1821-1830), historien et peintre. Il réalise de longs voyages en Orient, se rendant à Constantinople, visitant toute l'Égypte et la Nubie, traversant le Sinaï et rentrant par Suez et Alexandrie. En 1829, il publie deux volumes accompagnés d'un atlas de ces voyages.
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