"Après avoir vu cette ville (Le Caire), nous allâmes à la Meteree (Matariya), à six milles de là, et pour cet effet, il nous fallut monter sur des ânes, d'autant que les Égyptiens ne permettent point aux Chrétiens de monter à cheval disant qu'ils en sont indignes. La Meteree est le lieu où la Vierge se sauva avec son cher fils fuyant la persécution d'Hérode.
L'on voit là un figuier tout ouvert et fendu, qu'on dit s'être mis en cet état pour recevoir Jésus Christ, et tout auprès sortit miraculeusement une fontaine, laquelle court encore pour le jourd'huy. Les Maures mêmes la tiennent pour sainte et croient qu'étant bénie, elle guérit de la fièvre. L'on nous montra aussi, enchâssée dans une muraille une pierre sur laquelle la Vierge s'assoit ordinairement, et en dessous, il y a un autel, avec un petit oratoire où nous ouîmes la messe.
En cet endroit est le jardin, où cette tant précieuse goutte de baume est recueillie, de la coupe de certains petits arbres qui ne se trouvent que là, mais parce que chacun en a ouï parler, nous nous en retournerons à la ville pour puis après aller voir les Pyramides comptées de tout temps entre les sept miracles du monde. (...)
Continuons à cette heure notre dessein : (...) nous passâmes trois fois l'eau à cause du susdit débordement, passant au dessus d'une digue, nous vînmes au pied de ces trois Pyramides, vraiment admirables à cause de leur hauteur et grosseur.
Le plus haute a par le pied trois cents pas de "carrure", qui font douze cents de tour. Sa hauteur peut avoir six cents pieds. L'on dit qu'elle fut bâtie par Pharaon durant la captivité des enfants d'Israël, qu'il employa au travail de cette grande pièce. Les pierres dont elle est construite sont quasi égales, ayant trois pieds de long et deux de large, at autant d'épaisseur. Le sommet, encore que pour sa hauteur il paraisse en pointe, si est-il fait en terrasse de 21 pieds de "carrure".
Nous entrâmes dedans descendant premièrement cinquante pas, puis remontant environ quarante nous tirâmes par une allée large de quatre pieds et cinq de haut, et longue environ de trente pas, qui a au bout une petite chambre carrée environ de huit pas, mais toute ruinée et pleine d'ordures, et retournant par la même allée, nous vîmes à main droite la bouche d'une citerne fort profonde et grande, et montant soixante-six marches, nous entrâmes une chambre fort haute revêtue de marbre, longue de quarante pieds et demi, large de vingt et un, où l'on voit une grande pierre creuse de marbre thébaïque, qui est épaisse de trois ou quatre doigts, longue de douze pas, large de cinq, et profonde de cinq et demi. La pierre en est si fine, que touchant dessus avec une autre, elle sonne clair comme une cloche.
La seconde pyramide est un peu moindre que l'autre, et ne monte on au dessus à cause qu'elle était toute couverte de marbre y en restant encore par le haut environ quatre pieds.
La troisième beaucoup plus petite que celle-ci fut bâtie par Rodolphe pour lui servir de sépulture.
Tant d'auteurs écrivent de la rareté et excellence de ces édifices que nous n'en parlerons plus. Mais avant que retourner à la grande ville, nous irons voir les momies, choses aussi rares et remarquables.
À un mille de là, nous vîmes une tête taillée et attachée au roc, qu'ils appellent la tête de Pharaon, ayant le visage de la hauteur au moins de douze pieds, et la largeur proportionnée à cela. Puis laissant beaucoup d'autres petites pyramides, avec le lieu des Momies derrière nous, et à dix milles des grandes pyramides, allâmes coucher cinq milles plus loin, en un village où se tiennent ceux qui ont coutume de montrer lesdites momies."
extrait de Relation journalière du voyage du Levant faict et descrit par haut et puissant seigneur Henry de Beauvau, 1615, par Henry baron de Beauvau et de Manonville (15..-1630), seigneur de Fleuville, général et diplomate, conseiller d'État et chambellan du duc de Lorraine.
Il accompagna de Paris à Constantinople Monsieur de Salignac dépêché par le roi Henri IV en tant qu’ambassadeur auprès de la Sublime Porte pour y remplacer François Savary de Brèves. Après être resté dans la capitale ottomane jusqu’au 17 mai 1605, il fit un long voyage en passant par quelques îles de la Mer Égée, Chypre, le Moyen Orient, l’Égypte... en remontant le Nil jusqu’au "Grand Caire, monstre des Villes".
L'on voit là un figuier tout ouvert et fendu, qu'on dit s'être mis en cet état pour recevoir Jésus Christ, et tout auprès sortit miraculeusement une fontaine, laquelle court encore pour le jourd'huy. Les Maures mêmes la tiennent pour sainte et croient qu'étant bénie, elle guérit de la fièvre. L'on nous montra aussi, enchâssée dans une muraille une pierre sur laquelle la Vierge s'assoit ordinairement, et en dessous, il y a un autel, avec un petit oratoire où nous ouîmes la messe.
En cet endroit est le jardin, où cette tant précieuse goutte de baume est recueillie, de la coupe de certains petits arbres qui ne se trouvent que là, mais parce que chacun en a ouï parler, nous nous en retournerons à la ville pour puis après aller voir les Pyramides comptées de tout temps entre les sept miracles du monde. (...)
Continuons à cette heure notre dessein : (...) nous passâmes trois fois l'eau à cause du susdit débordement, passant au dessus d'une digue, nous vînmes au pied de ces trois Pyramides, vraiment admirables à cause de leur hauteur et grosseur.
Le plus haute a par le pied trois cents pas de "carrure", qui font douze cents de tour. Sa hauteur peut avoir six cents pieds. L'on dit qu'elle fut bâtie par Pharaon durant la captivité des enfants d'Israël, qu'il employa au travail de cette grande pièce. Les pierres dont elle est construite sont quasi égales, ayant trois pieds de long et deux de large, at autant d'épaisseur. Le sommet, encore que pour sa hauteur il paraisse en pointe, si est-il fait en terrasse de 21 pieds de "carrure".
Nous entrâmes dedans descendant premièrement cinquante pas, puis remontant environ quarante nous tirâmes par une allée large de quatre pieds et cinq de haut, et longue environ de trente pas, qui a au bout une petite chambre carrée environ de huit pas, mais toute ruinée et pleine d'ordures, et retournant par la même allée, nous vîmes à main droite la bouche d'une citerne fort profonde et grande, et montant soixante-six marches, nous entrâmes une chambre fort haute revêtue de marbre, longue de quarante pieds et demi, large de vingt et un, où l'on voit une grande pierre creuse de marbre thébaïque, qui est épaisse de trois ou quatre doigts, longue de douze pas, large de cinq, et profonde de cinq et demi. La pierre en est si fine, que touchant dessus avec une autre, elle sonne clair comme une cloche.
La seconde pyramide est un peu moindre que l'autre, et ne monte on au dessus à cause qu'elle était toute couverte de marbre y en restant encore par le haut environ quatre pieds.
La troisième beaucoup plus petite que celle-ci fut bâtie par Rodolphe pour lui servir de sépulture.
Tant d'auteurs écrivent de la rareté et excellence de ces édifices que nous n'en parlerons plus. Mais avant que retourner à la grande ville, nous irons voir les momies, choses aussi rares et remarquables.
À un mille de là, nous vîmes une tête taillée et attachée au roc, qu'ils appellent la tête de Pharaon, ayant le visage de la hauteur au moins de douze pieds, et la largeur proportionnée à cela. Puis laissant beaucoup d'autres petites pyramides, avec le lieu des Momies derrière nous, et à dix milles des grandes pyramides, allâmes coucher cinq milles plus loin, en un village où se tiennent ceux qui ont coutume de montrer lesdites momies."
(Pour la commodité de la lecture, l'orthographe de nombreux mots a été établie selon sa configuration moderne)
Il accompagna de Paris à Constantinople Monsieur de Salignac dépêché par le roi Henri IV en tant qu’ambassadeur auprès de la Sublime Porte pour y remplacer François Savary de Brèves. Après être resté dans la capitale ottomane jusqu’au 17 mai 1605, il fit un long voyage en passant par quelques îles de la Mer Égée, Chypre, le Moyen Orient, l’Égypte... en remontant le Nil jusqu’au "Grand Caire, monstre des Villes".
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