jeudi 23 juillet 2020

Les différentes configurations des routes des caravanes dans le désert égyptien, par le colonel de Dumreicher bey

Camel caravan amid the pyramids, by Edwin Lord Weeks (1849-1903)

"Dans les déserts d'Egypte le tracé des grandes routes de caravanes est imposé parles formations géologiques.
C'est une coïncidence bizarre que pour les deux moyens de transport si différents, la caravane et l'automobile, les mêmes formations géologiques soient favorables, ou défavorables, à l'automobile comme au chameau.
En donnant des noms spéciaux aux différentes formations du désert, le Bédouin n'est naturellement pas influencé par des considérations géologiques, mais par l'effet que ces formations ont sur la marche de sa caravane, sur la végétation qui nourrit ses chameaux et sur la visibilité des empreintes sur le sol.
Ces formations produisent le même effet sur le pneu de l'automobile et sur la plante de pied élastique du chameau. Comme les dénominations bédouines décrivent en un mot concis le genre de terrain que traversent les routes et donnent une idée exacte de la difficulté de leur construction, je me servirai (...) de ces noms arabes pour être plus bref et plus précis.
Des trente dénominations que les nomades donnent à ces déserts il n'y a que les six suivantes qui nous intéressent:
1° Le "sérir" est ondoyant, souvent recouvert de cailloux ronds. Les sentiers du sérir sont excellents et ce désert est très recherché par les caravanes. Le désert près des Pyramides de Gizeh est sérir.
2° Le "hamada" est un désert dur et plat, sans relief, couvert de petites pierres, de très petits cailloux ou de sable à gros grain. Cette formation est la plus favorable aux caravanes et à l'automobile. On trouve ce hamada surtout dans la Haute-Égypte sur la rive gauche du Nil, et au Sinaï.
3° Le "hamereia", ou Désert Rouge, est composé de terre glaise et sablonneuse. La contrée est ouverte et plate, et ce terrain est excellent pour la marche des chameaux.
4° Le "soulb", ou le Désert d'Acier, est la région calcaire semblable au plateau entre la Méditerranée et la grande dépression des oasis. Sur ce terrain dur et souvent accidenté, les pistes sont mauvaises et les chameaux deviennent boiteux. Il est aussi mauvais pour les pneus.
5° Le "gelda", ou le Désert de Cuir du Mariout et d’autres régions argileuses desséchées, est intéressant parce qu'en été il forme une admirable surface pour la marche du chameau et de l'automobile tandis que, après une averse, la terre glaise qui le recouvre devient glissante et dangereuse pour ces deux moyens de transport. Le gelda est, en effet, le fond d'un lac qui, pendant la saison des pluies, est couvert d’une nappe d'eau qui aplanit toute irrégularité du sol. Sous l'effet des rayons du soleil du printemps la terre argileuse devient dure comme une brique cuite, et plate comme un billard, de sorte qu'avec peu de frais on pourrait, en été, convertir le gelda en une piste idéale pour les automobiles.
6° Les "gerud" sont des dunes de sable qui empêchent tout genre de locomotion.
Les grandes routes de caravanes ne sont ordinairement pas mauvaises sauf aux endroits où elles se faufilent entre les dunes et aux descentes qui mènent de la plaine aux dépressions profondes des oasis. Elles évitent autant que possible les défilés et les tranchées dans lesquels les sables mous et profonds s'accumulent à l'abri des escarpements, ainsi que les dépressions dans le gelda qui sont impraticables en hiver. À travers le sérir et le hamereia, elles sont même bonnes et, à très peu de frais, pourraient être transformées sur tout leur parcours en routes d'automobiles passables, en enlevant, entre les sentiers, les pierres par-ci et les buissons par-là."

extrait de Le tourisme dans les déserts d'Égypte, 1931, par André de Dumreicher bey, descendant d'une famille germano-danoise qui faisait partie de la communauté européenne d'Alexandrie depuis la fin du XVIIIe siècle.
Il commanda, de 1900 (?) à 1910, le 'Camel Corps' des garde-côtes de l'administration égyptienne, unité évoluant à dos de chameau, dont la tâche était de sécuriser une frontière de plus de 4.000 kilomètres de long.
Ses principales responsabilités, selon ses propres termes, étaient "de combattre la contrebande de haschich et de sel" sur le territoire égyptien, ainsi que d'empêcher le débarquement illégal de pèlerins sur la côte de la mer Rouge et le long du canal de Suez, principalement en raison du danger de choléra.
Il a en outre supervisé divers projets de construction, dont celle d'un nouveau port pour la flotte de pêche aux éponges et d'une nouvelle mosquée à Marsa Matrouh.

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