Mais la vallée se rétrécit brusquement. Au pied du promontoire qui grandit devant nous, le village arabe de Kourna annonce le temple de Séti I. Monument incomplet et peu grandiose. Mais son rôle aujourd'hui est presque symbolique. Près de lui, on tourne à gauche, on quitte la vallée nourricière et l'on s'engage dans la montagne, par le chemin qui mène aux Tombeaux des Rois.
Pendant près d'une heure, la voiture nous transporte au petit trot par le défilé de mort. Vallée de torrent, raide st sinueuse, que les eaux dédaignent depuis des milliers d'années. Lointaines ou menaçantes, les roches grises, nues, usées, accentuent leur tristesse près des cailloux blancs du chemin. Partout le pied des falaises a été sondé, fouillé, creusé par les chercheurs de trésors, indigènes ou savants. Mais en vain. Il n'y a rien ici, pas même la mort ; le néant seul. Il y a le soleil qui se déchaîne et éclaire le désolant paysage, comme un visage fané. Tout est immobilité et tout est lumière. Il n'y a point d'ombre. Dans cette tortueuse vallée de montagne, le soleil n'est pas le visiteur, parfois indiscret, mais bienveillant, de nos climats. C'est un dieu, toujours présent, maître de l'air, et maître de la terre qui réfléchit ses rayons et nous plonge dans un bain de feu.
La route, enfin, aboutit à un cirque de dimensions restreintes. Murailles grises, sol éclatant de blancheur. Quelques sommets dénudés, une falaise à pic, comme boursouflée d'immenses tuyaux d'orgue, dominent des amoncellements de cailloux blancs, où courent des chemins. C'est là-dessous que l'on a découvert, que l'on découvrira encore l'entrée des tombes royales qui s'enfoncent sous la montagne.
À peu de distance de la barrière, au milieu même du cirque, un petit mur bas, une guérite, un soldat en armes. C'est le tombeau de Toutankhamon. Il vient d'être comblé et ne se distingue pas du sol voisin ; jusqu'à l'automne prochain, les fouilles sont interrompues. Les visiteurs, naguère, pouvaient y pénétrer. Des chambres, déjà, sont vides ; mais le sarcophage où le roi repose est encore inviolé, l'uræus ceint d'une humble couronne de fleurs naturelles. Nous, nous n'entrerons pas chez Toutankhamon ; mais nous avons vu son double au musée du Caire, et nous savons les disputes scientifiques, personnelles, administratives et nationales qu'a déchaînées sa découverte."
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