samedi 18 juin 2022

"L'esprit demeure accablé sous le poids de la grandeur égyptienne" (le duc de Raguse - XVIIIe-XIXe s. - visitant Karnak)

photo d'Antonio Beato, vers 1880

"Les ruines de Louqsor, quoique présentant une énorme masse et qu'elles soient d'un beau caractère, ne firent pas tort aux souvenirs que nous avaient laissés celles de Médynet-Abou ; mais il ne devait pas en être de même des ruines de Karnak, qui sont placées à une demi-lieue plus bas.
Ici la plume échappe. Qui pourrait décrire les merveilles rassemblées sous ses yeux ! L'imagination ne saurait créer un pareil tableau, et le langage est insuffisant pour en reproduire la plus faible partie. C'est un amas de palais, de temples, qui couvrent une surface immense et dont cinq ou six monuments comme le Louvre, réunis, n'approcheraient pas encore. L'esprit demeure accablé sous le poids de la grandeur égyptienne ; il faut contempler dans le silence de l'admiration ses créations majestueuses. Tout ce que j'essaierai, ce sera de donner quelques notions succinctes de ces magnifiques ruines.
On ne peut douter qu'elles ne se composent des restes de plusieurs palais ; mais on reconnaît facilement ce qui formait le palais principal. (...)
Il est certain que les monuments de Karnak sont l'ouvrage de plusieurs rois. Quels que fussent les moyens d'exécution, de pareils travaux ont dû exiger une longue suite d'années. (...)
Tel est en abrégé le coup d'oeil que présente Karnak. En voyant ces immenses ruines, on serait tenté de croire que les palais dont elles sont les restes ont été bâtis et habités par des hommes d'une nature supérieure à la nôtre. Tout y a un caractère de grandeur qu'on ne retrouve nulle part au monde. C'était un jeu pour les Égyptiens de cette époque que de réunir les masses les plus lourdes, d'exécuter les travaux les plus difficiles, et d'entreprendre les constructions les plus gigantesques."


extrait de Voyage en Hongrie, en Transylvanie, dans la Russie méridionale, en Crimée et sur les bords de la mer d'Azoff, à Constantinople et sur quelques parties de l'Asie Mineure, en Syrie, Palestine et en Égypte, Volumes 4 à 5, 1841, par Auguste-Frédéric-Louis Wiesse de Marmont (1774-1852), Duc de Raguse. Ce Maréchal de France participa aux campagnes de Napoléon, le "trahit" à Fontainebleau en 1814, puis servit les Bourbons, dut défendre les ordonnances en 1830 comme commandant de l'armée de Paris, et volontairement s'exila, voyageant en Autriche, en Syrie, en Palestine et dans les États de Venise.

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