"Ce sont les jours perdus, dit M. Ampère qui n'est pas seulement un savant, mais aussi un poète et un philosophe, ce sont les jours perdus qui comptent quelquefois le plus dans les souvenirs que laisse un voyage : si l'on ne faisait que passer et étudier, on ne garderait aucune impression des lieux. Il faut des jours vides d'action pour qu'ils puissent être remplis d'images."
Laisse-moi donc te raconter les pensées, les images, les impressions de ces jours perdus. Laisse le voyageur assis à l'ombre de sa voile contempler à loisir les paysages qui fuient, et essayer pour s'en souvenir de jeter quelques coups de crayon sans couleur sur une feuille éphémère.
Sans doute il est bon de déchiffrer les hiéroglyphes, de lire les inscriptions des siècles d'autrefois, d'interroger les idoles oubliées ; mais il est meilleur encore de se pénétrer de la teinte des lieux, de plonger ses regards dans le profond azur de ce ciel, de se recueillir et de méditer longuement en face de cette nature étrange et radieuse, devant ce fleuve sans pareil, et d'imprégner son imagination de cette merveilleuse mise en scène qui suscite toute les réminiscences de la Bible.
Ai-je tort ? Que suis-je venu chercher, en Égypte ? Est-ce la science ? Est-ce le soleil ? Est-ce le pays de la IVe ou de la XVIIIe dynastie ? Est-ce au contraire le pays où mourut Joseph et où naquit Moïse ? On peut étudier en France et à Paris ; on peut lire les cartouches et les hiéroglyphes dans le fauteuil de son cabinet ; mais ce qu'on ne saurait trouver ailleurs, ce sont les palmiers, les fellahines, les villages du Nil ; ce sont ces tableaux lumineux de l'Orient, ces charmantes scènes de la Bible ; c'est cette terre et ce soleil, c'est l'Égypte enfin avec son prestige et ses souvenirs. Comment ferais-je pour ne pas t'en parler ?
extrait de L'Égypte à la voile, 1870, de Laurent Laporte (1843 - 1922), conseiller honoraire à la cour d'appel de Paris
Ai-je tort ? Que suis-je venu chercher, en Égypte ? Est-ce la science ? Est-ce le soleil ? Est-ce le pays de la IVe ou de la XVIIIe dynastie ? Est-ce au contraire le pays où mourut Joseph et où naquit Moïse ? On peut étudier en France et à Paris ; on peut lire les cartouches et les hiéroglyphes dans le fauteuil de son cabinet ; mais ce qu'on ne saurait trouver ailleurs, ce sont les palmiers, les fellahines, les villages du Nil ; ce sont ces tableaux lumineux de l'Orient, ces charmantes scènes de la Bible ; c'est cette terre et ce soleil, c'est l'Égypte enfin avec son prestige et ses souvenirs. Comment ferais-je pour ne pas t'en parler ?
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