lundi 21 octobre 2019

"Le sable, surtout, a été le plus précieux conservateur des nécropoles" (Daninos Pacha)

"L'Illustration" - 26 mai 1894
"Mettre les morts à l'abri de toute atteinte de l'inondation a été le principe qui a toujours guidé les Égyptiens dans le choix de l'emplacement réservé aux nécropoles. Dans le Delta, les morts ont été ensevelis, soit dans l'épaisseur des murs d'enceinte des villes et des temples, quand ces murs étaient en briques crues, soit dans des tumuli élevés au milieu des plaines. La Moyenne et la Haute-Égypte ont profité des avantages que leur offraient les chaînes Lybique et Arabique qui, des deux côtés, confinent aux plaines cultivées, et les habitants ont pratiqué, dans le rocher qui forme ces montagnes, les puits et les grottes destinés à recevoir leur mort. Rarement, les morts ont été confiés à la terre nue. Aux basses époques, les buttes qui marquent l'emplacement des villes détruites ont été quelquefois employées comme lieu de sépulture et les décombres qui s'élevaient, en les cachant au-dessus d'anciennes tombes, ont servi aussi au même usage.
C'est en raison de leur enfouissement dans les décombres ou dans le sable, que les tombeaux et les temples ont échappé à l'action du temps, moins destructive que la main des hommes.
Le sable, surtout, a été le plus précieux conservateur des nécropoles ; et si, après tant de milliers d'années, l'on retrouve des monuments révélant les détails des moeurs d'un peuple dont la civilisation et la puissance étonnent, c'est incontestablement aux obstacles résultant de l'accumulation du sable que l'on doit cet avantage.
Toutes les manifestations de la vie chez une grande nation, ont laissé, sur ces monuments, des traces éclatantes de son passage.
Ils nous initient, depuis les fondateurs des pyramides jusqu'au règne de Cléopâtre, à tous les détails de la vie d'un peuple, et nous font connaître ses pensées les plus intimes et ses sentiments les plus élevés.
On peut donc dire que, du fond des nécropoles, l'Égypte ancienne reparaît tout entière au grand jour de l'histoire et semble revivre parmi nous.
Les tombes ne forment jamais un tout bien coordonné ; elles n'ont pas été non plus construites sur un type uniforme ; néanmoins, à (quelque) époque qu'il appartienne, un monument funéraire complet est divisé en trois parties : la Chapelle extérieure, le puits et les caveaux souterrains."


extrait de Les monuments funéraires de l'Égypte ancienne, 1899, par l'égyptologue Albert Daninos Pacha (1843-1925), membre d'une importante famille grecque installée en Égypte au XIXe s. Il fut attaché au musée du Louvre et inspecteur des fouilles en Égypte.

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