photo de L. Fiorillo (18..-18..) |
Avant de partir, nous avons voulu revoir les Pyramides et le Sphinx. Nous avons passé plusieurs heures à leur dire adieu ; j'avais le cœur gros, en remontant le chemin sablonneux qui du Sphinx mène aux Pyramides ; je me retournais sans cesse pour contempler encore une fois le colosse étonnant, pour graver dans ma mémoire les traits de ce visage prodigieux. Il me semblait quitter non pas une pierre insensible, mais un être fantastique, doué d'une vie sereine et supérieure, capable de comprendre mon regret. Dire adieu est toujours si triste, que malgré moi les larmes me montaient aux yeux.
Il est triste de tourner une page du livre de la vie, même lorsqu'elle est douloureuse ; mais combien plus quand elle est toute charmante ! On voudrait au moins conserver ses souvenirs intacts ; mais la mémoire débile ne nous offre bientôt plus qu'un fantôme décoloré, impuissant à réveiller dans l'âme les émotions que la réalité faisait naître. Ainsi l'on vit ! Un spectacle à peine entrevu est déjà renouvelé, et l'âme s'épuise en vains efforts pour ressaisir le passé, jouir du présent, et même anticiper sur l'avenir. La gerbe est trop touffue, nos bras sont trop courts, les fleurs tombent et se fanent."
extrait de Un hiver en Orient, 1892, par Mag Dalah (pseudonyme), ouvrage préfacé par Edmond Rousse, de l'Académie française
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.