photo extraite de l'ouvrage de Ch. Lallemand |
Les Pyramides sont comme la signature historique et nationale de cette contrée d'où la lumière, la civilisation, les lettres et les arts ont pris leur essor, pour rayonner sur le monde entier, en passant par la Grèce. À ce tire, les Pyramides commandent la vénération, encore plus que l'admiration.
Expression colossale de ce qui a pu sortir des mains des hommes, elles sont là depuis cinquante ou soixante siècles, inrenversables ; et elles diront bien encore à cinquante ou soixante autres siècles que l'Égypte fut le berceau des civilisations du vieux monde, et que les populations riveraines du Nil ont pu édifier en ces temps reculés des constructions gigantesques, "merveilles du monde". Merveilles d'architecture surtout, si, sans s'attacher à la prodigieuse accumulation des matériaux, l'on considère, pour admirer sans réserves, la conception de l'intérieur de l'édifice, conception qui permet de ranger l'architecte de la pyramide de Chéops parmi les plus grands artistes de n'importe quel temps.
Les "savants d'à côté", comme il y en aura toujours, n’ont pas manqué d'attribuer aux Pyramides les destinations les plus variées : astronomique, météorologique ou climatérique. Il en est qui ont poussé la fantaisie jusqu à voir dans ces édifices le suprême refuge de la race humaine pour le cas de quelque nouveau déluge universel.
Les constatations scientifiques indiscutables qui ont eu raison de ces chimères, d'accord en cela avec les auteurs anciens, permettent d'affirmer une fois pour toutes, que les Pyramides sont des constructions tumulaires royales, remontant aux premières dynasties pharaoniques. Tumulaires, puisque les sarcophages y ont été retrouvés ; royales, parce que l'on connaît le nom des monarques qui y avaient été ensevelis et que, du reste, les tombes royales pouvaient, seules, être terminées en pointe. Hérodote, le père de l'histoire, qui a visité Les Pyramides quatre siècles et demi avant J.-C., alors qu’elles portaient encore des revêtements couverts d'inscriptions, nous a transmis les noms des rois qui les ont construites. Ces renseignements concordent avec ceux d'autres écrivains, comme Eratosthène et Diodore, et aussi avec les découvertes modernes, qui ont montré le nom de Chéops écrit dans l’une des chambres supérieures.
Il est donc avéré que les trois grandes Pyramides de Gizèh ont été construites par Chéops, Chephren et Mikérinus, dont les noms sont écrits Khoufou, Khafra et Menkéra, dans les inscriptions.
On connaît, entre le Delta et Fayoum, sur un parcours d'environ 75 kilomètres, plus de 80 Pyramides mais lorsqu'il est question des "Pyramides d'Égypte", on entend surtout parler des trois Pyramides de GizÈh, qui sont les plus grandes, les mieux conservées et les plus commodes à visiter, étant à peine à 12 kilomètres du Caire, auquel elles sont reliées par une fort belle route.
Vues de loin, de la citadelle du Caire ou des rivages du Nil, silhouettes dorées, empourprées, roses ou grises, selon l'heure du jour et l'éclat de la lumière, les Pyramides font aux paysages verdoyants de l'immense vallée un horizon dentelé, délicieusement original.
Et, sur la grande route qui mène en ligne droite du Nil à Gizèh, quand elles apparaissent encadrées par les branches des arbres ou reflétées dans quelque vaste mare laissée par l’inondation retirée, elles s’arrangent en des motifs gracieux et pittoresques.
De plus près, en bas de la côte, on éprouve quelque déception. Le défaut d'échelle ne permet pas une juste appréciation, et la masse rocheuse sur laquelle elles sont établies, leur fait, au point de vue du volume, une visible concurrence. Mais aussitôt que l’on parvient sur le plateau, on se sent empoigné et comme écrasé par leurs proportions colossales, par ces masses énormes, auprès desquelles les Bédouins groupés contre les assises inférieures apparaissent comme des fourmis au pied d'un gros chêne. On a alors le sentiment du volume prodigieux de ces édifices étonnants, de leur âge extraordinaire, et aussi de leur indestructibilité. On a devant les yeux des œuvres humaines qui dureront autant que les montagnes."
extrait de Le Caire, de Charles Lallemand (1826-1904), écrivain, peintre dessinateur et illustrateur
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