mardi 18 septembre 2018

" Les paysages du Nil inspiraient naturellement les artistes d'autrefois" (Jean Bayet)

Scène agricole - Tombe de Nakht - TT 52 - Illustration de Norman de Garis Davies
“La pureté de l'air est telle en ces régions que les distances paraissent abolies et que les différents plans, au lieu de fuir les uns derrière les autres, semblent s'élever les uns au-dessus des autres. Ceci nous explique en partie que les artistes égyptiens qui sculptèrent les frises des temples ou les bas-reliefs des hypogées, n'aient pas cherché à pénétrer les lois de la perspective. Ils ont réuni sur un même plan les divers motifs que la nature leur présentait ; ils ont renoncé à rendre les accidents du terrain et les distances qui semblaient se fondre dans la transparence de l'atmosphère. Leurs personnages se meuvent sur une ligne droite ; leurs paysages se superposent, et ceux qui occupent les registres supérieurs des bas-reliefs sculptés ont les mêmes dimensions que ceux des registres inférieurs.
Ne reconnaît-on pas d'ailleurs dans les scènes pastorales qui se déroulent le long des rives du Nil les éléments même des sujets qui décorent les plus anciens monuments de la vieille Égypte ? Les bœufs qui se rendent aux champs, à pas lents ; la charrue antique qui trace péniblement son sillon à travers les terres grasses ; les pêcheurs traînant leurs filets pesants ; les charpentiers accroupis sur la berge qui heurtent de leurs marteaux les flancs d'une barque en construction. Les paysages du Nil inspiraient naturellement les artistes d'autrefois, lorsque, pour honorer les tombes de leurs morts, ils évoquaient, sur les parois des caveaux funéraires, les motifs qui rappelaient leur vie terrestre, et devaient égayer leur existence d'outre-tombe au souvenir des joies humaines. Dans le bas des murailles, ils ciselaient des épisodes de la vie sur le fleuve : théories de bateaux, joutes de bateliers, scènes de pêche et de chasse aux oiseaux de rivière. Au-dessus se développaient des scènes de la vie agricole : le labourage, les semailles, les récoltes, le battage des blés. Plus haut, c'étaient les pâturages, avec leurs troupeaux de boeufs et de moutons ; enfin, tout au bord des voûtes, les sables du désert, les battues sur les pistes des gazelles.”

extrait de Égypte, 1911, par
Jean Bayet (1882-1915), fonctionnaire au ministère de l’Instruction publique français, direction de l'enseignement supérieur

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