photo : Marc Chartier |
Ainsi une lutte sans trêve se poursuit entre ce bon et ce mauvais génie ; selon que le Nil ou le désert l'emporte, les paysages d'Égypte offrent l'aspect de la vie ou de la mort. Les fortunes contraires de ce combat, le caprice des crues, les grands circuits du fleuve qui déplacent les horizons et surtout les jeux imprévus d'une incomparable lumière ajoutent à la grâce et à la variété du spectacle.
Aussi, malgré l’apparente uniformité de cette vallée, longue, du Caire à Philé, de plus de neuf cents kilomètres, la navigation du Nil a-t-elle je ne sais quel charme qui vous gagne et peu à peu vous envahit tout entier. Cette impression peut être lente à venir ; elle se dégage dans la Haute-Égvpte, où s'épanouit une végétation déjà presque tropicale, où l’on voit rapprochés les types les plus divers, grâce à la douceur du climat, au voisinage immédiat de la Nubie, des oasis, de la côte arabique.
En même temps, les deux chaînes parallèles multiplient en se resserrant et accentuent leurs reliefs.
Les éléments de ce paysage sont d'une extrême simplicité. Mais la régularité toute architecturale des grandes lignes, la nudité de ces montagnes où ne subsiste aucun principe de végétation, montagnes sillonnées, calcinées, dévorées par les rayons ardents ; l'aspect rigide de cette nature minérale que le soleil, selon les heures du jour et du crépuscule, pare des colorations les plus éclatantes ou les plus délicates ; les profils de ces roches inabordables, les perspectives des sommets ravinés qui se prolongent et se renouvellent, tous ces traits donnent tour à tour à la vallée du Nil un caractère saisissant d’immobile majesté ou de grâce fugitive."
extrait de "En Égypte", par Gabriel Thomas, substitut du procureur général de Nancy, dans Mémoires de l'Académie de Stanislas (Nancy), 1893
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